À cause de Jésus et de l’Évangile – PRÊTRES AUJOURD’HUI

20151011_181703Le présent document est le fruit d’une réflexion de prêtres diocésains du Québec et du Nouveau-Brunswick engagés dans des ministères variés et appartenant à la Fraternité sacerdotale Jesus Caritas. Il se propose d’examiner la situation actuelle du prêtre à la lumière de l’Évangile et de la spiritualité de Charles de Foucauld. Comme je l’écrivais au petit comité chargé d’amorcer la réflexion2, «c’est à ce niveau que nous pouvons offrir un apport original à cette question débattue depuis plusieurs années et regardée trop souvent sous l’angle du voir. Il pourrait alors se dégager un AGIR, des pistes d’action ou un renouvellement des attitudes de nature à nous stimuler comme prêtres et à nous faire revenir à l’essentiel, avec comme guides l’Évangile et le frère Charles».

Plus dans le document PDF ci-dessous: Prêtres aujourd’hui Fraternités Région Québec – Acadie

QUÉBEC – ACADIE: Témoignace de Laurent RAVENDA et la Prière d’Abandon

Prière d’Abandon

Témoignage

Laurent RAVENDA

J’ai connu le frère Charles de Foucauld grâce à deux chances que j’ai eu dans ma vie.

Première chance : d’abord comme séminariste, le hasard ou plutôt la providence a fait que je fus attitré à la paroisse Très-Saint-Nom-de-Jésus dans un quartier populaire (Hochelaga-Maisonneuve) de Montréal. Le curé qui venait de prendre charge de la paroisse était Jacques Leclerc, celui qui avec son ami Guy Bouillé, créa la première fraternité de Jésus-Caritas en Amérique du Nord. Ce prêtre exceptionnel fut pour moi un mentor tout au long de mon cheminement au sacerdoce et très vite je voulus me joindre à cette organisation qui pouvait transmettre une telle spiritualité.

Deuxième chance : une fraternité de « Petites Soeurs de Jésus » est venue s’établir dans le fond d’une ruelle de notre paroisse. Le contact avec ces religieuses si différentes de celles que j’avais l’habitude de côtoyer me confirma dans mon désir de mieux connaître le frère Charles de Foucaud.

Un jour, mon curé m’invita à participer à une retraite de Jésus-Caritas. La formule, le prédicateur (un prêtre des fraternités du Brésil), les autres participants, tout avait été une expérience formidable. Je me souviens que dans la voiture au retour, j’ai dit à mon confrère séminariste et ami Jean-Pierre Langlois : « je veux faire partie de ce groupe ». Quelques mois plus tard, notre équipe de jeunes prêtres et séminaristes intégrait les fraternités Jésus-Caritas.

Plus tard, j’ai lu la biographie du frère Charles écrite par Jean-François Six : plusieurs points de sa spiritualité m’ont convaincu qu’il avait un message pertinent pour notre temps.

Il y avait d’abord Nazareth. Le constat que Dieu s’était incarné et avait voulu d’abord partagé dans le silence et l’amitié la vie des gens ordinaires d’un petit village de la Palestine. Avant de prêcher, il faut d’abord « s’incarner », être solidaire, se faire proche des gens, mener une vie simple… C’était la condition préalable à l’évangélisation selon le frère Charles.

L’idée d’être un frère universel était un autre aspect que me rejoignait. Accueillir tous ceux qui se présentent chez nous surtout les plus pauvres. Il fit également l’expérience d’être accueilli et soigné par eux. Ce fut une grande leçon pour lui. Accueillir et respecter les différences culturelles. Je fus en particulier impressionné par l’ouverture du frère Charles devant le monde musulman, son admiration face à leur foi.

Expérience en mission et la prière d’abandon.

En septembre 1980, je partais pour une expérience missionnaire qui allait durer huit années dans l’Amazonie du Pérou. Prêtre diocésain, j’y allaiscomme «associé » aux Prêtres des Missions Étrangères de Pont-Viau.

Comme première étape, la société missionnaire m’envoya pour quelques mois à Cuernavaca au Mexique en classe d’immersion pour étudier la langue espagnole.

Je me souviens qu’au début ce fut une période un peu difficile. Je venais de laisser une paroisse dans laquelle j’avais vécu mes premières années de ministère. J’y avais mis tout mon coeur et laisser plusieurs amis. Durant les dernières semaines avant mon départ, j’avais été entouré par ma famille, mes amis que je savais que je ne verrais pas avant plusieurs années. J’arrivais dans un milieu qui, quoique assez agréable, m’était totalement inconnu. J’étais le seul étudiant dans l’endroit où j’étais logé. La vieille dame qui y vivait me servait mes plats et se retirait me laissant regarder seul la télévision. Je ne parlais pas la langue…

Mais surtout, je pensais à ce qui m’attendait au Pérou et j’étais un peu anxieux. Comment allais-je réagir moi un gars de ville à la vie dans une bourgade au milieu de la jungle? Comment serait le contact avec un peuple et une culture si différente à la mienne?

Bref, après avoir coupé les liens affectifs, j’avais les « bleus » et l’avenir me paraissait un peu plus sombre maintenant que j’avais « traversé le pont » et qu’il n’était plus question de retourner en arrière.

C’est alors que je me suis tourné vers la prière d’abandon du frère Charles de Foucauld : « Mon Père, je m’abandonne à toi. »…

Je la reprenais à chaque jour dans ma prière. Après quelque temps, je fus surpris de voir l’effet que cette prière avait provoqué chez moi. Je réalisais que j’étais plus calme et confiant. J’avais retrouvé mon enthousiasme à l’origine de ma demande de partir en mission. Je ne savais pas plus ce qui m’attendait dans la jungle mais je savais qu’avec le Christ, je n’avais pas à m’inquiéter. Durant les huit années de mon expérience missionnaire et par la suite (41 ans de vie sacerdotale) je n’ai jamais eu de doutes sur le chemin qui se présentait devant moi. J’imagine que cela correspond un peu à la vie du frère Charles qui s’est déplacé de différents lieux (France, Syrie, Palestine, Algérie) en assumant différentes fonctions (moine, jardinier, ermite, prêtre) sans jamais douter que le Christ l’accompagnait et le guidait.

Une fois rendu dans mon nouveau milieu de vie, je pensais souvent au frère Charles, le frère universel, qui a partagé simplement la vie avec les gens. Mon habitation que je partageais avec quelques jeunes péruviens était toujours ouverte et accueillante aux passants. C’était ma façon de vivre la spiritualité de Nazareth i.e. Jésus qui partage la vie ordinaire des gens.

Même mon implication progressive dans la défense des droits des personnes aux prises avec des injustices était ma façon de répondre à un autre appel du frère Charles : « Nous n’avons pas le droit d’être des chiens muets et des sentinelles muettes : il nous faut crier quand nous voyons le mal ».

Bref, avec son inlassable recherche de la volonté de Dieu, son désir de « crier l’Évangile avec toute sa vie », son apostolat de la bonté, le frère Charles a été pour moi une inspiration dans ma vie. Et je crois que son message est de plus en plus nécessaire pour le monde d’aujourd’hui.

Laurent Ravenda, curé

Notre-Dame-de-la-Trinité, Verdun. Montréal QUÉBEC

Appel à l’Espérance, VIVIERS, Juillet 2015

Une trentaine de prêtres, avec un évêque, un diacre et son épouse, venant du Tchad, du Niger, du Burkina Faso, d’Algérie, d’Italie, de Suisse, d’Autriche et de France, guidés par la spiritualité du bienheureux Charles de Foucauld se sont rassemblés pour prier et réfléchir ensemble sur le thème «  notre ministère de prêtre diocésain au service de la rencontre entre chrétiens et musulmans ».Ils sont issus de contextes très différents.

Ensemble, nous lançons cet appel à l’Espérance :

« Garder l’unité de l’Esprit par le lien de la Paix » (Ephésiens 4,3) Cette parole de l’Apôtre Paul exprime ce que nous nous efforçons de vivre dans notre ministère, particulièrement dans les relations entre chrétiens et musulmans. Notre désir de dialogue prend sa source dans l’initiative de Dieu qui le premier est entré en dialogue avec les hommes (cf Paul VI, Ecclesiam Suam)

Les signes d’injustice, de violence et de guerre sont de plus en plus manifestes. Le sort des minorités chrétiennes, musulmanes et autres du Moyen-Orient illustre de façon criante cette situation. Nous dénonçons à ce propos une collusion de plus en plus visible entre les puissances occidentales et des pays qui favorisent le développement de courants sectaires et violents au sein du monde musulman dans ce début de XXIè siècle.

Il nous parait urgent, dans ce contexte très tendu, de nous engager résolument sur la voie de la connaissance mutuelle et du dialogue. « L’ignorance mène à la peur, la peur à la haine et la haine à la violence » (Averroès XIIIè siècle)

Face à la radicalisation et à la montée des extrémismes, nous appelons à la fraternité, qui permet le respect de la liberté religieuse, le combat pour la justice, la paix et la réconciliation. Cette fraternité rassemble des hommes et des femmes de bonne volonté.

Nous témoignons que des relations d’amitié existent entre chrétiens et musulmans. Des chrétiens et des musulmans s’engagent ensemble au service des plus démunis de nos sociétés, notamment dans l’accueil des migrants. Un peu partout dans le monde nous voyons se créer des groupes où des chrétiens et des musulmans dans une recherche commune de convivialité font des expériences concrètes de rencontre spirituelle et de partage.

Ce climat d’amitié permet un dialogue en vérité et ne peut que nous enrichir mutuellement et apaiser peur et tension. Des chrétiens et des musulmans croient en cela. Comme prêtres, nous nous en réjouissons. Ainsi nous nous inscrivons dans le souffle d’Amour de Jésus qui est venu renverser toutes les barrières entre les hommes.

De plus en plus, nous avons à apprendre à vivre au quotidien ensemble. Dans notre ministère de prêtre, nous appelons nos communautés chrétiennes à annoncer l’Evangile en vivant l’expérience de la rencontre amicale avec les musulmans. Cette expérience est source d’action au service de la fraternité universelle, voulue par Dieu et révélée en Jésus. Dans cet esprit nous voulons désarmer la violence qui est en nous (cf Christian de Chergé), et face à toute violence extérieure à nous-mêmes, nous restons fidèle à notre détermination à «  crier l’Evangile par toute notre vie », devise du frère Charles de Foucauld. Ainsi nous rendons compte de l’Espérance qui est en nous. (1 Pierre 3,15-16)

Viviers, vendredi 17 juillet 2015 (jour de fête de l’Aïd el Fit’r pour les musulmans)

Contact : Jean-François Berjonneau

viviers-juillet-2015

PDF: Viviers, Encontre des prêtres en relation avec l’Islam, Juillet 2015