SAINT CHARLES DE FOUCAULD : J’AI EU UN RÊVE

Ce fut un événement très simple : les petits et les humbles ont vécu avec le pape François la canonisation du « Frère Universel »

foucauld-dream-1Charles de Foucauld est mort d’une « surdose d’humanité ». C’est la vraie raison pour le proclamer Saint. Jamais il n’aurait imaginer une telle « Gloire du Bernin », faite avec beaucoup d’amour par les touaregs sur la grande haima qu’ils ont édifiée près de Tamanrasset et composée de trois morceaux de toile bleue et de pierres locales : morceaux de vie des gens de cette terre et de la planète, œuvre de Dieu ; pierres qui ne sont pas des armes qui font peur, mais le patrimoine d’un monde merveilleux qui nous nourrit et nous conduit comme disait François d’Assise dans son cantique des créatures.

foucauld-dream-2Le pape François a aimé parler en arabe avec son accent argentin. Un fort vent lui a arraché ses feuilles qui se sont envolées dans les dunes, et il a continué en parlant espagnol ; et tous l’ont compris chacun dans sa propre langue et culture, avec sa couleur de peau distincte et le cœur ouvert à cette fête et au partage. Le maître Jésus nous a donné une leçon de fraternité universelle, un maître fou pour ses disciples et les humains ; un rêveur libre qui répète son engagement avec nous dans chaque geste d’amour. Le foucauld-dream-3pape nous a partagé le pain des plus pauvres, celui que Jésus donna à ses amis, comme il l’avait fait lors de la canonisation de Monseigneur Romero qui fut toujours « Saint Romero des Amériques » ; Ce pain qui est reçu par les pauvres et par celui qui a besoin de la miséricorde de Dieu et de celle du prochain. C’est ce pain que Frère Charles n’a pas pu partager en grande ou petite célébration quand il a vécu en terre africaine, mais qu’il sut rendre présent par sa vie, sa condition de voisin et d’homme de Dieu, dans le Nazareth du partage quotidien, lui-même fragile et humble qui avait besoin des autres.

foucauld-dream-4Ce fut une grande joie d’être avec des gens du monde entier parmi les plus humbles ; croyants et non croyants, chrétiens ou non, tous ceux qui au-delà des formes religieuses cherchent la paix, l’égalité entre tous, le bien commun. Il n’y avait pas les ornements voyants, ni les tuniques dorées, ni cardinaux, ni évêques, ni curés, ni uniformes, ni armes même si celles-ci sont simplement décoratives. On sentait simplement la présence de Jésus, fait homme pour nous et devenu l’ami de tous par la volonté du Père des miséricordes. Il abrite en son cœur tous les pauvres du monde, ceux qui fuient la guerre et les victimes du système économique . C’est Jésus toujours crucifié en ceux qui n’ont rien et Jésus ressuscité en chacun, en celui qui commence à naître.

foucauld-dream-5Ils sont tous là comprenant cette cérémonie sans grandes offrandes, sans l’hypocrisie du protocole diplomatique. Eux, sans droit à la parole, à la santé, à l’école ou à l’université, à la possibilité de vivre dignement avec un toit ou une maison, privés de nourriture ou de leur propre terre ; ils sont là des milliers sans bruit ni grands discours, eux qui n’avaient jamais entendu parler du Frère Charles ni de Jésus de Nazareth.

On trouve Shilma, réfugiée du sud-est asiatique :Myanmar, mère de six enfants, apatride et sans ressources, visage de millions de personnes victimes de diverses ségrégations ; son mari Modid recherche chaque jour comment alimenter sa famille et lui-même souffre de tous les effets de la malaria,

Golu, indien de dix ans, fouille les poubelles et doit faire vivre sa famille avec un seul repas de riz quotidien. Golu rêve du jour où il pourra étudier, et faire respecter ses droits.

foucauld-dream-7Margarita de Mexico-city qui prend soin de son petit-fils totalement handicapé depuis vingt ans, luttant pour sa famille ; c’est une femme de grande foi ; elle est convaincue que la prière et sa confiance en Jésus sont sa force principale. Elle prie la Vierge de Guadalupe non seulement pour son petit-fils ou sa famille ou ses voisins, elle prie pour les plus pauvres de quelque nationalité qu’ils soient.

Aboubakar, un adolescent du Burkina Faso, dénutri, porteur du V.I.H. transmis par ses parents, souriant, impressionné, car il n’est pas le seul du monde qui ait des problèmes ; ses grands yeux me font penser aux yeux du Créateur.

foucauld-dream-8Hadmed, soixante ans, a vécu presque la moitié de sa vie dans le camp de réfugiés de Yarmuk en Syrie. La guerre est son unique compagne quotidienne comme le mp3 rivé aux oreilles d’un jean européen ou américain; il pense à la paix, la paix entre les enfants du même Dieu que l’on prie dans les mosquées, les églises, les pagodes ou les synagogues.

foucauld-dream-9Et Terry, qui au bord de la mer à Cairns au nord de l’Australie, se déplace difficilement avec son unique jambe. Il a perdu l’autre à cause d’une mauvaise circulation sanguine. L’alcool court dans ses veines, ainsi que les mauvais souvenirs d’avoir tout perdu : travail, famille, amis …. Il s’en remet chaque nuit à la bonté des volontaires d’un refuge pour pauvres. Malgré tout il continue de rire et de parler avec tous, c’est un grand bavard ; Je crois que le seul qui l’écoute c’est Warrior, son vieux chien sourd. Il dit qu’il n’a pas de religion, mais qui sait ….

foucauld-dream-10J’ai connu Raquel une espagnole, habituée des rues obscures de Carthagène où elle travaille pour continuer à consommer de l’héroïne et de la cocaïne. Raquel est transsexuelle et n’a jamais trouvé sa place dans sa famille ou dans la société ; pour tout revenu elle se prostitue pour survivre, mais en vérité ce qui lui donne vie c’est l’amitié de ses compagnes, leur appui quand elle est à peu près bien. Elle porte un chapelet au cou, cela dit-elle lui donne de la chance et la protège ; mais elle a honte d’entrer dans les églises parce qu’on la regarde de travers ; alors elle prie Dieu et la Vierge quand elle passe à proximité d’une église.

foucauld-dream-11Et je pourrais continuer à raconter les vies et les milliers de visages de Jésus en cette canonisation du Frère Charles présidée par l’amour de Dieu et les appels à considérer chaque être humain comme un frère ou une soeur. Par les autres nous apprenons à être digne d’un même Père. Les uns récitent «  la prière d’abandon » d’autres ferment les yeux et rêvent d’un monde meilleur, d’autres comprennent que la foucauld-dream-12fraternité est une façon de grandir en spiritualité et en engagement, d’autres encore sentent qu’il ne sont pas seuls.

Nous nous regardions les uns les autres, et il n’y avait aucune méfiance entre nous, et nous avons compris que le message de Jésus dépasse les frontières, les religions, la vie avec Dieu ou sans Dieu ; son message de fraternité universelle, sa mort et sa résurrection sont vraiment « une surdose d’humanité ».

foucauld-dream-13Saint Charles de Foucauld prie pour nous.

foucauld-dream-14Mariano PUGA CONCHA

Santiago de Chile Juin 2015

Assemblée générale 2015 de la fraternité Iesus Caritas – Burkina Faso

Tanghin, le 25 mai 2015

Nous avons confié au Seigneur notre rencontre par une prière des laudes animée par l’Abbé Luc Edgard YELEMOU du diocèse de Dédougou.

Etaient présents à cette rencontre:
burkina-faso-asambleeAbbé Jean ZOUGOURI, Dédougou
Abbé Gustave SAWADOGO, Koudougou
Abbé Luc Edgard YELEMOU, Dédougou
Abbé Simon Evariste KI, Dédougou
Abbé Omer SAWADOGO, Ouahigouya
Abbé Jacques Philippe TOE, Dédougou
Abbé Adrien OUEDRAOGO, Ouahigouya
Abbé B. Ernest SOME, Bobo-Dioulasso
Abbé Stanislas SOW, Dédougou

Ordre du jour

  • Vie des différentes fraternités
  • Propositions pour les différentes rencontres
  • Cotisations
  • L’organisation de la fraternité nationale : renouvellement du bureau de la fraternité ?
  • Divers

Vie des différentes fraternités

Diocèse de Dédougou

Le diocèse de Dédougou compte une bonne vingtaine de membres et d’adhérents. Ceux qui constituent la fraternité sacerdotale Iesus caritas à Dédougou sont, pour la plupart, des jeunes prêtres. Dans le diocèse de Dédougou, il n’existe pas de fraternité séculière formée ou organisé.

Vue l’importance numérique des membres et adhérents, la fraternité sacerdotale Iesus caritas de Dédougou a été comme subdivisée en quatre sous-groupes suivant les quatre doyennés du diocèse, afin de réduire les distances pour les rencontres. Tous les sous-groupes n’arrivent pas toujours à tenir les trois rencontres annuelles que nous avons arrêtées de commun accord.

Par contre, la fraternité a pu tenir une rencontre regroupant les adhérents et sympathisants dans la paroisse de Safané.

Considérant la difficulté à tenir les rencontres périodiques, chacun est encouragé à vivre la spiritualité foucauldienne par l’adoration quotidienne, le désert, la révision de vie, la simplicité de vie, etc. Vue la composition du groupe, constitué de prêtres proches par l’âge, l’ordination et l’amitié sacerdotale, avons régulièrement les nouvelles les uns des autres et nous rencontrons en dehors des cadres formels et organisés. En plus, le document du Frère Aurelio, responsable international, nous a permis d’approfondir la connaissance des aspects fondamentaux de la fraternité Iesus caritas.

A Dédougou, la fraternité rencontre deux difficultés majeures : la difficulté du temps après que tous les plannings ont été élaborés et la difficulté financière pour répondre aux besoins de fonctionnement de notre fraternité. Par conséquent, nous avons émis l’idée de profiter des rencontres diocésaines de la fraternité sacerdotale ou d’autres rencontres pour tenir certaines activités.

Diocèse de Ouahigouya

Grâce au concours de l’Abbé Jean, venu à la rencontre diocésaine, la fraternité s’organise mieux. On peut dire que cette venue a relancé voire redonner du tonus à la fraternité sacerdotale. Aujourd’hui, la fraternité compte une dizaine de membres dispersés par la mission. C’est la grande famille qui se retrouve chaque samedi à l’Evêché pour une heure d’adoration. Il y a deux sous-groupes : à Ouahigouya et à Bam. L’Abbé Adrien est le responsable du premier sous-groupe et l’Abbé Omer, le responsable du second. Nous vivons la douleur de la séparation d’avec l’Abbé Mathieu SAWADOGO, le 1er mai 2015. L’Abbé Gustave était présent au titre de la fraternité sacerdotale. Merci de votre communion et que, par la miséricorde de Dieu, l’âme de notre frère repose en paix.

Diocèse de Kaya

Le passage de l’Abbé Jean, en janvier, nous a rassemblés. Nous sommes une dizaine de prêtres à former la fraternité Iesus caritas et Il y a un bureau fonctionnel. Mais il n’y a pas eu, pour le moment, de rencontre. Celle qui avait été programmée n’a pas pu se tenir. La fraternité est constituée majoritairement de jeunes prêtres.

La branche laïque nous épaule fortement. Le dimanche 31 mai se célèbrera le 75ème anniversaire de la congrégation des petites sœurs de Jésus à Kaya. Tout le monde y est convié !

Fraternité du Grand Séminaire de Kossogê (Ouagadougou)

Nous sommes deux. Il n’y a rien de particulier, en raison des programmes personnels. Il serait bien de créer un cadre de rencontres avec les prêtres de l’archidiocèse de Ouagadougou.

Archidiocèse de Bobo-Dioulasso

Les membres de la fraternité sacerdotale Iesus Caritas échangent des nouvelles entre eux. Nous avons à faire des efforts pour nous retrouver. Le responsable est l’Abbé Fernand SANON. Le groupe est composé de : l’Abbé Emmanuel SANON, l’Abbé Jean Emmanuel TRAORE, l’Abbé Joachim BINGBOURE, l’Abbé Ghislain SOME et l’Abbé B. Ernest SOME

Quelques apports consécutifs à la présentation de la vie des fraternités diocésaines

Le fait d’être jeunes dans la fraternité n’est pas un problème. On encourage les fraternités numériquement importantes à se subdiviser en petites fraternités pour faciliter la révision de vie. Les moyens de communication ne remplacent pas les rencontres physiques, mais facilitent la communication. Il faut toujours travailler pour que la fraternité ne s’arrête jamais avec les rencontres.

Propositions pour une bonne marche de la fraternité

  • Que les responsables diocésains aient des contacts entre eux !
  • Faire des rencontres dans les différents diocèses pour faire connaître la fraternité sacerdotale aux différentes communautés diocésaines, y compris la branche laïque.
  • Du 28 soir au 29 décembre 2015 midi : Assemblée générale à Kaya.
  • Ne pas exclure la possibilité de participer aux sessions ordinaires avec les laïcs, les retraites, les éventuelles visites du Frère responsable international, etc.

Réorganisation de la fraternité : renouvellement du bureau ?

L’Abbé Jean ZOUGOURI a fait part à l’assemblée des difficultés de fonctionnement du bureau actuel. Les anciens membres étaient : l’Abbé Dieudonné OUEDRAOGO, actuellement Responsable du Service Administratif et financier de l’Université Catholique de Bobo-Dioulasso, l’Abbé Modeste SANOU en service à la paroisse de Dapoya (Bien engagé dans le Renouveau Charismatique, maintenant) et l’Abbé Jean ZOUGOURI (responsable qui se bat seul). Sur cette question, les participants à la rencontre ont suggéré à l’Abbé Jean ZOUGOURI d’entrer en contact avec les anciens membres du bureau pour savoir ce qui les empêche de jouer leurs rôles. Et alors, nous procèderons au renouvellement du bureau lors de l’assemblée générale.

Informations relatives à l’organisation du centenaire de la mort de Charles de Foucauld en 2016 (données par l’Abbé Gustave)

Une rencontre s’est tenue à Ouagadougou. Dans l’attente du rapport définitif, les idées suivantes ont été émises :

  • Lancer une année jubilaire en décembre 2015
  • Faire connaître Charles de Foucauld et approfondir sa spiritualité
  • Confectionner des pagnes
  • Constituer un comité ad hoc pour trouver un thème et faire des propositions

Cotisations

Elles s’élèvent à 10 000 F par personne et par an. Comment les rassembler ? Par diocèse, avant le 30 novembre 2015 !

Divers

Notre confrère Mathieu SAWADOGO de Ouahigouya est décédé le 1er mai 2015. Toutes nos condoléances à la fraternité de Ouahigouya.

Notre frère Jean KROSS qui était à Niamey est rentré en Europe pour toujours. Il est parti avant Pâques.

Nous aurons une rencontre internationale de la fraternité à Viviers en France du 13 au 17 juillet 2015. Tous les responsables nationaux ont été invités.

Dans la mesure du possible, nous prendrons part au jubilé d’albâtre des petites sœurs de Jésus à Kaya le 31 mai 2015.

La rencontre a pris aux environs de onze heures par la célébration eucharistique et le déjeuner. Dieu bénisse notre fraternité !

Abbé Stanislas SOW
Secrétaire de séance

Laurent DOGNIN, évêque de Quimper et Léon

Laurent Marie Bernard DOGNIN, évêque de Quimper et Léon depuis le 20 mai 2015.

Laurent DOGNIN, frère de la Fraternité Sacerdotale, est né le 3 janvier 1953 à Paris, il a cinq frères et sœurs et grandit à Meudon où il prend conscience de sa vocation dès l’âge de huit ans. Il est ordonné prêtre le 15 juin 1980 pour le diocèse de Nanterre.

Il exerce successivement les fonctions de vicaire à Levallois-Perret jusqu’en 1986, de vicaire puis de curé de la paroisse Sainte-Geneviève d’Asnières-sur-Seine jusqu’en 1997. De 1988 à 1990 il est également délégué régional du Frat de Lourdes. En 1997 il devient curé de Saint-Pierre et Saint-Jacques et doyen de Neuilly-sur-Seine poste qu’il occupe jusqu’en 2006. De 2003 à 2006 il exerce également la fonction de vicaire épiscopal pour le secteur Centre du diocèse de Nanterre. En 2006, il devient vicaire général du diocèse en charge en particulier de la vie consacrée, des mouvements et associations de fidèles et modérateur de la curie diocésaine.

Il occupe également des responsabilités au sein de la Fraternité sacerdotale Jésus Caritas dont il est responsable régional pour l’Ile-de-France et la Haute Normandie de 2002 à 2008 et responsable européen de 2007 à 2011. Inspiré par cette spiritualité de Charles de FOUCAULD, il avait pris pour habitude avant sa nomination comme évêque, de pratiquer une fois par mois, une journée de désert.

gaudentesLe 5 janvier 2011, le pape Benoît XVI le nomme évêque titulaire de Macriana di Mauretania et évêque auxiliaire de Bordeaux auprès du cardinal Jean-Pierre Ricard. Il est consacré par ce dernier le 27 février 2011.

Le 20 mai 2015 il est nommé par le pape François, évêque de Quimper et Léon et sera installé le 5 juillet en la cathédrale Saint-Corentin de Quimper. Ne connaissant le diocèse qu’en l’ayant traversé dans son enfance en motocyclette, il exprime à sa nomination sa volonté de connaitre quelques mots de breton mais aussi d’en comprendre la culture1.

Conférence des évêques de France

De 2012 à 2014, il est membre de la Commission épiscopale pour la Mission universelle de l’Église. Responsable du Service National de la Pastorale des Migrants et des Personnes Itinérantes (SNPMPI).

À ce titre, il participe, aux côtés de dix-huit organisations chrétiennes, à la rédaction d’une brochure consacrée à une réflexion chrétienne sur l’accueil des migrants : « À la rencontre du frère venu d’ailleurs »

Le 17 avril 2013, il est élu président du Conseil d’Orientation de RCF (Radios Chrétiennes Francophones), lors de l’assemblée plénière des évêques de France à Paris.

À l’assemblée plénière des évêques de France d’avril 2014, il est élu, en outre, président de la Commission épiscopale pour la Mission universelle de l’Église, charge qu’il exerce depuis le 1er juillet 2014.

« In Spe Gaudentes » (Rm 12,12)
(« Joyeux dans l’Espérance »)

Petites Soeurs de Jésus en Ceuta

Ceuta, 7 mai 2015

Bien chères petites sœurs et amis,

Depuis plus d’un an de discernement et préparation, réflexion et prière, le moment est arrivé de nous mettre en route pour venir à Ceuta. Le 9 avril, nous avons débarqué sur cette terre pour commencer une nouvelle fraternité et vivre dans ce lieu de frontière, qui est une porte de l’Afrique pour l’Europe. Une ville de 80.000 habitantes, interculturelle et interreligieuse, où il y a la moitié de musulmans, une communauté chrétienne, une communauté juive et une autre hindou sindhîs. Il y a 40 mosquées, 7 églises, une synagogue et un temple hindou. Au niveau géographique, cette ville se trouve dans le nord du Maroc, et il y a 14 kilomètres par la mer jusqu’à l’Espagne : Algeciras. Ce passage on l’appelle « El Estrecho de Gibraltar ». Nous sommes entourés par la mer Méditerranée et l’Océan Atlantique. C’est une très belle ville et en même temps c’est une ville d’une grande complexité et de mille contrastes en très peu d’espace, 30 kms carrés ! Nous sommes en train de découvrir différentes réalités que nous parlent et touchent beaucoup : 8 kilomètres de grillage que tellement de gens essaient de sauter… la mer qui nous entoure partout où les migrants risquent leur vie pour pouvoir arriver… tout l’échange commercial de la frontière… les femmes mulets… la clandestinité : pas seulement des africains mais aussi des marocains et des algériens qui deviennent tous des personnes « sans papiers »… les conditions de travail sont durs avec des salaires très bas, surtout pour les femmes qui viennent tous les jours du Maroc… les enfants qui arrivent tout seuls et sont placés dans des structures du gouvernement… et le CETI « Centre de séjour temporaire pour les migrants » pour un premier accueil, géré par le gouvernement, avec une capacité de 500 personnes et beaucoup de fois ils sont deux fois plus… etc !

Depuis notre arrivée nous « campons » dans une pièce d’un appartement en attendant que les travaux de l’appartement où nous seront logées soient finis. Nous habitons dans un quartier très populaire : HADU. Les rencontres sont faciles, nous avons déjà fait connaissance avec nos voisins, avec les gens de notre quartier, les personnes qui vont à la paroisse, les migrants… nous sommes très bien accueillies par tous et la vie nous amène continuellement à rendre grâce pour le don de la Fraternité.

Nous avons fait un « pèlerinage » vécu avec beaucoup de respect et silence, illuminé et accompagné par la prière et la Parole de Dieu: « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie » nous dit Jésus et ces jours-ci, Lui nous répète sans arrêt : « … demeurez en moi, aimez-vous… »… pèlerinage pas seulement intérieur mais aussi vers des lieux où la vie et la mort se retrouvent :

  • Benzu, où nous avons prié et découvert la brutalité des grillages infranchissables !
  • el Tarajal, l’unique endroit pour passer la frontière, où nos yeux ne peuvent pas croire ce qu’on y voit !
  • au CETI, où nous avons trouvé une grande humanité de la part de toutes les personnes qui travaillent là-bas. Ils nous ont ouvert les portes pour que nous puissions y aller et accompagner surtout les femmes qui ne sortent pas…
  • le Maroc, que nous apercevons de loin et qu`avec facilité nous pouvons rejoindre. Avec un passeport européen, c’est facile…et à côté, des centaines et centaines des jeunes qui sont cachés dans la forêt en attendant le jour béni de passer chez nous….Combien de visages nous avons déjà rencontrés qui resteront pour toujours gravés dans notre cœur ! Rabat, Castillejos et aussi Tanger où nous avons pu rejoindre l’évêque Santiago qui est un vrai frère !
  • S’arrêter sur la plage pour prier, pour  cueillir les fruits de la journée et contempler la beauté de cette nature nous fait aussi rejoindre la tragédie qui, dans la Méditerranée, se vit et où continuellement meurent des personnes sans nom et que nous, maintenant, nous commençons à pouvoir connaître…presque tous ceux que nous avons connus, ont vécu au cours de leur traversée cette expérience de la mort d’un ami, d’un membre de la famille…c’est trop difficile d’écrire ce que nous avons écouté !

Nous avons fait, en ces jours, l’expérience que la mort n’a pas le dernier mot, la force de vie et de leur foi sont tellement grandes que notre espérance grandit, nous rentrons dans le Mystère Pascal avec chacun d’eux, et cela est une grâce qui nous change au plus profond de nous-mêmes !

Un mot, un regard, une petite salutation…nous a fait faire connaissance avec quelqu’un à la porte d’un magasin ou dans la rue, en nous amenant à pouvoir écouter des histoires inimaginables de tout le chemin qu’ils ont fait pour arriver jusqu’à ici… Combien de souffrances !!!! Doucement nous avons créé des liens… commencé à nous faire des amis… Leur foi nous encourage et c’est leur soutien, quelle beauté ! Ils nous ont demandé d’aller prier avec eux…Ils nous expriment que ce dont ils ont besoin, c’est de pouvoir parler et confier ce qu’ils ont vécu, tout ce qu’ils portent dans leur cœur car ils ont « vu et vécu beaucoup »…Quelques-uns nous ont dit que c’est la première fois qu’ ils sont accueillis, salués… invités à manger…et pour nous, les voir chez nous est une grande joie et surtout les reconnaître !

Notre vie est colorée par des petits gestes très concrets, simples : accueillir les larmes, écouter un mot, risquer la relation, une parole d’affection, des regards qui se croisent et parlent de la détresse qu’ils portent dans leur cœur…des gestes que nous percevons comme des gestes évangéliques porteurs de vie, de force, de lumière, de paix ! En plus, vivre cela ensemble, en communauté est source d’un grand bonheur !

Nous faisons tous les jours l’expérience d’être soutenues par votre prière et affection. Nous vivons un moment où nous pouvons toucher que nous avons besoin des autres, un petit exemple : une femme, Jadija, qui nous accompagne les 3 kilomètres de la frontière jusqu’à Castillejos à pied, simplement pour pas nous laisser seules sur le chemin !!!!

Un cadeau : Alpha, un jeune de Guinée Conakry, que nous avons connu dans la rue, ce matin avec 32 collègues a eu la possibilité de prendre le bateau pour rejoindre la péninsule. Ceuta ne peut pas retenir tout ce monde qui arrive et au fur et à mesure ils sont « expulsés » mais cela leur ouvre aussi la possibilité de rester en Europe et de s’ouvrir un chemin, c’est leur rêve !! Etre témoin de leur joie au port et être avec eux a été pour nous une expérience forte et émouvante… leur traversée n’est pas finie ni les difficultés non plus… ils viennent maintenant à vers l’ Europe où ne sera pas facile pour eux !

Comme Moïse, cette terre qui devient notre « terre » est un lieu sacré que nous ne voulons pas seulement habiter, mais aimer et, en enlevant nos sandales, prier continuellement pour que « le Règne de Dieu vienne, pour que nous devenions des frères et sœurs sans barrière, sans crainte, sans mur ni grillage… »

C’est vrai, commencer une fraternité sans rien d’autre qu’aller à la rencontre, en cherchant un lieu où habiter et du travail pour vivre, en faisant du quotidien l’espace où notre cœur s’unifie pour vivre comme des filles bien-aimées du Père… C’est une grâce qui réveille en nous tous les désirs de suivre JESUS et de fixer notre regard seulement sur LUI…Vous pouvez rendre grâces avec nous de savourer la beauté d’un temps comme notre présent.

« Depuis que vous êtes ici, il y a comme une paix autour de nous.. » nous dit une voisine, cela est une petite perle qui sûrement va nous aider dans les moments peut-être plus difficiles, mais pour l’instant, avec cette Paix que Jésus nous offre, nous vous disons notre amitié et gratitude pour ce que vous nous avez donné en étant sur l’autre rive !!

Gloria, Luigina Maria, Paloma et Rosaura

Compte-rendu Assemblée Castelfranco, Claudio CHIARUTTINI

Compte-rendu de l’Assemblée de Castelfranco Veneto

6-12 avril 2015

Canonisation

Le P. Bernard Ardura, postulateur, expose les questions concernant une cause de canonisation en général. Il n’est pas suffisant d’avoir un dossier illustrant les vertus du bienheureux, il n’est même pas encore suffisant un miracle obtenu par son intercession, il faut aussi que la canonisation contribue au bien de l’Eglise et de la société. La dernière condition revient au jugement du Pape et elle est parfois la raison du retard de la proclamation d’un saint.

Venant à Charles de Foucauld, une immense grâce a été récemment obtenue par son intercession. Une femme malade d’une tumeur sur l’épaule aurait dû avoir le bras amputé. Un chirurgien a accepté le défi de sauver le bras, tout en disant que vraisemblablement il n’aurait pas pu être utilisé. Il y a eu un mouvement de prière et le bras a été non seulement sauvé, mais aussi récupéré au 50%, par la merveille du chirurgien même et de tout le milieu médical qui n’avaient jamais vu rien de pareil. Cette grâce ne peut cependant pas être considérée un miracle selon les critères de l’église, faute de l’incomplète récupération du bras (il faut le 100% de guérison !) et du fait que le résultat s’explique par la grande capacité du chirurgien.

Dans la discussion qui suit, Claude Rault, face à ceux qui reprochent à l’Association de ne pas prier assez, affirme que « nous serons très heureux de la canonisation, mais pour nous le plus important est faire connaître la figure de frère Charles au de la de l’espion de la France et le faire connaître au musulmans comme témoin de Dieu ».

Centenaire

Marianne informe que le logo à la plus haute résolution est disponible pour être copié sur clé USB.

Les participants informent des évènements prévus.

compte-rendu-assemblee-castelfranco-evenements-prevus

Autres initiatives

Algérie

  • Le pèlerinage n’est pas possible au sud.
  • D’autres localités sont par contre accessibles, telles Béni Abbes, Timimoune, Ghardaïa, El Golea avec des agences locales et la contrainte des escortes.
  • Possibilités de retraites et temps individuels à Béni Abbes sans contrainte d’escorte.
  • Publication du livre de Antoine Chatelard : « Vers l’Assekrem ».

Allemagne

  • La Fraternité Séculière et les Petites Sœurs de l’Evangile prépareront un programme de cinq semaines d’Exercices spirituels dans la vie courante qui sera publié pour un usage individuel et pour l’animation dans les paroisses.
  • Faire des timbres poste personnalisés de commémoration du centenaire tirés par le secrétariat.

Centrafrique

  • Sur demande de la Fraternité Séculière, un programme de formation historique sur Ch.d.F. est en route sur la durée de six mois et deux rencontres par mois.

Israël

  • Petite Frères Jesus Caritas : Année foucauldienne à l’occasion de 120 de l’arrivée de Fr Charles a Nazareth.

Liban

2015

  • Visite au Patriarche Libanais pour l’informer du centenaire et demander la bénédiction
  • Faire connaître la spiritualité de Fr Charles a travers :
    • Distribution de livres dans les librairies religieuses
    • Rencontres paroissiales et diocésaines
    • Diffusion de films et documentaires sur les medias laïc et religieux.

2016

  • Célébration eucharistique sous le patronage du patriarche Maronite.
  • Retraite spirituelle rassemblant toute la famille spirituelle et les amis des différents groupes.
  • Présenter une pièce de théâtre et un récital de chants inspirés aux écrits de Fr Charles.

Syrie

Voici les idées qu’ils sont en train de discuter :

  • Une messe générale avec toute la famille spirituelle.
  • Une journée spéciale de toute la famille spirituelle.
  • Une conférence aux sujet de : « Entre le particulier et le général, qu’est-ce que la famille spirituelle de Foucauld a donné à l’Eglise et qu’est-ce qu’elle en a pris ? »
  • Si la situation le permet, une rencontre entre les pays du monde arabe en Liban ou en Syrie.

Aux amis du diocèse de Maroua-Mokolo et de Tokombéré

P. Grégoire CADOR

Tokombéré, le 23 avril 2015

Aux amis
du diocèse de Maroua-Mokolo
et de Tokombéré

Chers amis,

Trois mois déjà depuis ma lettre du 24 janvier…

Entretemps j’ai eu la joie de revoir certains d’entre vous lors de mon passage éclair en Sarthe pour la conférence de sensibilisation que Mgr Le Saux m’a permis de faire au Mans. Grand merci à lui et à tous ceux qui ont ouvert le cœur du diocèse du Mans à nos frères déplacés de Maroua-Mokolo.

Je voulais vous remercier tous très chaleureusement pour votre mobilisation physique, spirituelle et matérielle à cette occasion…

Certains qui ne pouvaient pas être là l’ont été quand-même grâce à d’autres qui ont très largement relayé les infos et le cri d’alarme que je voulais faire entendre. Merci à tous, grands et petits, de ces efforts qui mettent en œuvre la communion des saints de manière visible et palpable.

Merci à tous ceux qui ont « mis la main au portefeuille »… Les dons pour la Caritas diocésaine continuent d’arriver et ont déjà dépassé les 30.000 euros. Cela va vraiment nous « aider à aider »… Merci à tous.

Au-delà de la question matérielle, je suis très touché par les nombreux courriers qui continuent de manifester l’intérêt et le souci de beaucoup à notre cause qui rejoint celle de très nombreuses personnes à travers le monde. Ne relâchez pas vos efforts. Il est plus qu’urgent de faire retentir en nos vies l’écho de l’amour de Dieu pour tous les hommes, bons ou mauvais.

Je le dis et je le répète, chrétiens, nous sommes dépositaires de la Bonne Nouvelle de la fraternité universelle.

Citant le philosophe musulman Abdennour Bidar, le Pasteur Agnès Lefranc, de l’Eglise protestante unie du Mans, sollicitée pour une conférence à la paroisse de la Couture au cours du Carême 2015 ? disait : «la fraternité s’apprend. On ne naît pas fraternel, on le devient.» Je voudrais aller même au-delà en redisant que la fraternité nous précède puisqu’elle nous vient comme un héritage reçu de Dieu. Comme tout héritage, il nous faut l’apprivoiser. Et alors : Oui, la fraternité s’apprend. Car, si nous naissons frères, nous ne sommes pas toujours spontanément, ni forcément fraternels. Mais nous sommes appelés à le devenir…

Le monde d’aujourd’hui est un formidable défi à notre foi.

Les horreurs que nous voyons défiler sur nos écrans de télé actuellement sur ce qui se passe en méditerranée sont les conséquences directes de ce que la Pape dénonce comme la mondialisation de l’indifférence. La coupe est pleine et commence à déborder ! Il va bien falloir un jour que les riches acceptent de partager avec les pauvres, autre chose que les miettes qui tombent de leurs tables… Il va bien falloir trouver d’autres chemins que la violence et l’édification de barrières pour contenir la « montée des frères ». Aucun blockhaus, aucune forteresse ne pourra jamais contenir ni mettre à l’abri du frère qui a faim !

La seule solution c’est le partage ! Et donc la « déprise » de soi et la remise en question des avantages acquis.

Dans le véritable microcosme ou monde en miniature qu’est Tokombéré, nous avons vécu, il y a peu, les habituelles « Journées de Promotion Humaine ». Elles ont rassemblé pendant deux jours, un millier de responsables villageois venus de tous les secteurs de la paroisse. Chrétiens, musulmans, pratiquants de la religion traditionnelle, originaires d’une dizaine ethnies différentes. Je ne résiste pas, pour commencer, à vous donner l’intitulé de l’invitation qui a été mis au point par les organisateurs :

Thème retenu: « Etre Homme (homme et femme) aujourd’hui à Tokombéré ».

En 2015, nous constatons que nous sommes brassés les uns avec les autres (ethnies, religions…). Nos racines s’entremêlent et parfois se mélangent. Cela nous fragilise car nous ne savons plus exactement qui nous sommes et ce que veut dire être un homme aujourd’hui. Il n’est plus possible, comme autrefois, de nous construire en opposition les uns contre les autres. C’est ensemble, les uns avec les autres, que nous pouvons définir vers quoi nous voulons marcher. C’est le rôle de notre Projet de Promotion Humaine. Nous aurons à nous poser les questions suivantes :

1. Qui suis-je aujourd’hui comme être humain ?

a. en tenant compte de mes racines
b. en tenant compte des questions nouvelles qui se posent
c. en tenant compte des blocages que je rencontre partout

2. Que puis-je espérer ?

a. Quels sont mes objectifs et mes désirs ?
b. Comment m’ouvrir à ceux des autres ?

3. Que pouvons-nous faire pour atteindre ensemble ces objectifs ?

a. Le Projet de Promotion Humaine (PPHT) peut-il nous aider dans ce sens ?
Comment ?
b. Et moi, que puis-je faire là où je suis ?

Et pour vous donner un aperçu de la qualité du travail abattu, je vous livre un extrait de l’introduction du P. Justin : «Nos journées doivent nous obliger à changer, à reconnaitre notre identité, permettre de discuter ensemble pour voir ce qui est bon et ce qui est mauvais. On ne peut pas être un individu aujourd’hui sans être solidaire, on ne peut plus vivre aujourd’hui comme ont vécu nos ancêtres autrefois. Seul, je ne peux rien, il faut coopérer pour qu’on se développe. Il faut dépasser nos différences pour s’identifier, construire l’Homme nouveau.»

Continuons avec les nouvelles :

Le 19 mars, jour de la St Joseph nous avons vécu la passation de service entre l’ancien et le nouveau médecin-chef ! Après quarante ans, Christian passait la main à Jean-Pierre au cours d’une célébration pleine d’émotion et de simple dignité. La vie continue et Christian garde la lourde responsabilité de l’ensemble du Projet de Promotion Humaine et de curé de la paroisse !

Mgr Bruno Ateba, notre nouvel évêque, a effectué sa première visite au collège Baba Simon. Il a visiblement été impressionné par tout ce qui s’y fait. Il semble décidé à nous aider à continuer les efforts malgré les nombreuses difficultés que nous rencontrons devant la concurrence des très nombreux établissements publics qui se multiplient de façon anarchique autour de nous.

Monseigneur reviendra bientôt pour ouvrir le temps des « Portes de l’Avenir » avec le Projet-Jeunes et célébrer une cinquantaine de confirmations.

Nous avons vécu un très belle et fervente Semaine Sainte enracinée dans la foi et l’espérance avec en point d’orgue 55 baptêmes le jour de Pâques (une vingtaine d’autres étant répartis dans les semaines suivantes et les différents secteurs de la paroisse). Dans le contexte que nous vivons les mots et gestes de la liturgie pascale sont plus qu’évocateurs et se passent aisément de commentaires. En communion avec nos frères persécutés des églises d’Orient, je reprends juste ces mots tiré de leur liturgie : « C’est aujourd’hui le jour de la résurrection ! Soyons rayonnants pour la fête et embrassons-nous les uns les autres. Disons, ’O frères’, même à ceux qui nous haïssent ! Et crions: le Christ est ressuscité d’entre les morts ; à ceux qui sont dans les tombeaux, il a donné la vie ! »

L’assemblée des « jeunes agriculteurs de Kotraba » a permis de faire le point avec eux sur les grandes difficultés qu’ils ont rencontrés cette année avec une récolte très moyenne et la situation d’insécurité qui les a particulièrement menacés. Cette année il n’a pas été possible d’envisager de nouvelles recrues mais nous comptons bien reprendre l’an prochain.

Concernant Boko-Haram nous étions dans une relative tranquillité depuis quelques semaines mais la semaine dernière le village musulman de BIA, situé à une cinquantaine de kms de chez nous (à environ 10kms de la frontière), a été entièrement détruit par le feu, une vingtaine de personnes tuées et une grande quantité de bœufs emportés… Nous devons rester très vigilants dans tous les sens du mot.

Le résultat des récentes élections présidentielles et régionales au Nigéria laissent entrevoir une lueur d’espoir. Le nouveau président semble décidé à prendre le problème Boko-Haram à bras le corps ainsi que les causes de son émergence dans la région.

Le 09 mai, nous allons conclure le cycle de formation interreligieuse dont je vous ai souvent parlé. Nous invitons tous les participants et intervenants des premiers week-ends (environ 140 personnes) pour une journée de synthèse et de réflexion sur le thème de «l’engagement du croyant dans la société.» Merci à ceux qui prient de penser à nous ce jour-là !

Début mai nous aurons aussi l’Assemblée générale des jeunes menuisiers qui se fait normalement en mars mais cette année le calendrier a perdu ses repères !

Avec les parents qui acceptent de prendre bénévolement du temps pour cela, nous sommes en train de mettre sur pied les chantiers de vacances 2015 qui permettent aux élèves de familles pauvres de s’inscrire au collège Baba Simon.

Voilà en gros les nouvelles qui vous montrent que nous ne nous ennuyons pas et que nous savons que la violence n’est pas le dernier mot !

Merci d’être avec nous.

Nous sommes ensemble.

A bientôt.

Grégoire

Je propose à votre médiation un texte de Paul Bhatti, chrétien pakistanais dont le frère Shahbaz ministre pakistanais des minorités religieuses, assassiné en 2011, disait dans son testament : «Je me considérerai comme un privilégié si – dans mon effort et dans cette bataille qui est la mienne pour aider les nécessiteux, les pauvres, les chrétiens persécutés du Pakistan – Jésus voulait accepter le sacrifice de ma vie. Je veux vivre pour le Christ et pour lui je veux mourir.»

La violence fondamentaliste a-t-elle encore un lien avec la religion ?

« Les attaques récurrentes contre les chrétiens en Irak, au Pakistan, en Syrie ou encore au Nigeria ont une racine commune : l’idéologie de groupes terroristes qui utilisent la religion pour imposer leurs vues et s’en prendre aux plus fragiles. C’est le cas en Irak avec l’État islamique (EI), mais aussi au Pakistan où les violences faites aux chrétiens sont directement proportionnelles à l’instabilité politique, économique et religieuse du pays. Aussi la tentation est grande d’établir un amalgame entre la religion apparemment en cause, à savoir l’islam, et ce qu’en font ces groupes terroristes qui bénéficient de nombreux soutiens financiers à travers le monde.

Aucune religion ne permet de tuer ou de mourir au nom de Dieu. Dans les textes bibliques ou coraniques, seul Dieu a le pouvoir de donner ou de retirer la vie. Ceux qui, au nom de l’islam, tuent des innocents, font l’apologie du suicide ou considèrent les autres religions comme ennemies n’ont rien à voir avec la religion dont ils se réclament. Tout discours religieux part du respect de l’humanité et ne vise qu’une victoire, celle de l’amour. Qui s’impose par la force dévoie la religion, chrétienne ou musulmane.

« La grande pauvreté et l’absence d’éducation constituent le terreau privilégié du terrorisme » 

En tant que chrétien engagé dans la défense des minorités au Pakistan, je connais l’islam de l’intérieur. J’ai suffisamment étudié ses textes pour savoir que leur interprétation varie d’un pays à l’autre et que l’histoire des premiers siècles de l’islam – en particulier la décision de faire la guerre ou non – ne doit jamais être séparée de son contexte et ne peut servir de règle à toutes les époques. Au Pakistan, je côtoie aussi beaucoup de musulmans de bonne foi qui aspirent au dialogue et à la paix. Certains l’ont payé de leur vie, comme Salman Taseer, gouverneur musulman du Pendjab, assassiné en janvier 2011 parce qu’il prenait avec mon frère, le ministre Shahbaz Bhatti, la défense des chrétiens emprisonnés à cause de la loi sur le blasphème. Aujourd’hui encore, des avocats et activistes musulmans des droits de l’homme défendent les chrétiens au Pakistan, bravant tous les jours la peur et les menaces. Ils sont à mes yeux la plus belle expression de l’islam.

Parce que la violence qui se déchaîne sous nos yeux n’est pas de nature religieuse, les leviers sur lesquels nous pouvons agir sont avant tout politiques et sociaux. La grande pauvreté et l’absence d’éducation constituent le terreau privilégié du terrorisme. C’est pourquoi il revient aux leaders politiques et religieux de s’asseoir autour d’une même table afin d’examiner les vrais problèmes de leur pays et de prendre des mesures concrètes, à commencer par la fermeture des écoles religieuses où les enfants sont endoctrinés dès leur plus jeune âge. La Turquie, l’Indonésie ou les Émirats arabes unis ont accompli de réels progrès dans ce sens et sont parvenus à diminuer leur niveau de violence. »

Propos recueilli par Samuel Lieven
La Croix du 05 septembre 2014