Thierry BECKER

Décès du père Thierry Becker

Cher tous,

Notre frère Thierry est parti très paisiblement cette nuit un peu avant minuit. Nous savions depuis l’après-midi et une ultime dialyse qu’il n’y avait plus rien à espérer de son cœur fatigué à l’excès. Je récitais le chapelet en lui tenant la main quand il a rendu un imperceptible dernier souffle. Avec le départ de Thierry beaucoup ont à faire le deuil d’un père, d’un frère, d’un ami, mais comment ne pas rendre grâce pour une telle vie à ce point accomplie.

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Lettre 2019 – Thierry Becker

Bien chers frères et sœurs, conjoints et descendants, cher(e)s ami(e)s

Belle année à chacun et chacune dans le bonheur de vivre ce que l’on a à vivre, d’accueillir l’amour et de le donner. Voici ce qui a marqué pour moi cette année écoulée en plus du service habituel des Petites Sœurs des Pauvres qui m’accueillent, de la visite hebdomadaire aux prisonniers de la prison d’Oran, de la visite aux hospitalisés que j’accompagne souvent jusqu’à la mort, de l’accueil des arabophones qui veulent parler de leur expérience du Christ et du suivi de leur démarche. Le Ministère de l’Intérieur a renouvelé ma carte de séjour de 10 ans si bien que je peux rester à Oran jusqu’à l’âge de 95 ans !

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Texte 5. Le dialogue dans l’itinéraire spirituel du frère Charles. Jean-François BERJONNEAU

Jean-François BERJONNEAU, France

Le Frère Charles a vécu soixante ans avant le Concile Vatican II.

La notion de dialogue interreligieux telle que nous l’entendons aujourd’hui dans l’Église lui était totalement étrangère. Tout en ayant été, je le crois, un précurseur des ouvertures du Concile sur la dimension universelle de la mission de l’Église, la démarche d’un dialogue entre croyants chrétiens et musulmans en tant que tels n’entraient pas dans ses catégories. Il a vécu avec la théologie de son temps dans la hantise de rejoindre les musulmans pour sauver « ces âmes ignorantes » en leur faisant connaître le Christ.

De plus, il a accompli son ministère dans un contexte socio politique précis. La France, en son temps, étendait son empire colonial sur une partie de l’Afrique. Beaucoup pensaient à cette époque qu’elle faisait œuvre civilisatrice et qu’elle pouvait apporter l’instruction nécessaire pour libérer les peuples colonisés de la misère et de l’ignorance. Le Frère Charles a adhéré à cette visée. Il n’a donc pas vu dans l’islam de son époque une religion ayant sa consistance propre, son histoire, ses courants diversifiés avec certains desquels des chrétiens puissent entrer en dialogue.

Bien que l’islam ait exercé sur lui, à un certain moment de sa vie, une certaine fascination et que la rencontre avec les musulmans ait constitué pour lui une étape non négligeable sur le chemin de sa conversion, il aurait été loin de souscrire à cette vision conciliaire de l’islam selon laquelle « L’Église regarde avec estime les musulmans qui adorent le Dieu Un, vivant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé avec les hommes… » (Nostra Aetate N°3). Il ne se situait donc pas dans la problématique théologique du Concile Vatican II qui reconnaît dans les religions non chrétiennes la présence de « semences du Verbe » qui puissent constituer une base pour entrer en dialogue avec des croyants d’une autre religion.

Cependant, il me semble que l’on peut pourtant considérer le Frère Charles comme un précurseur du dialogue. Car il a institué avec les populations musulmanes qu’il a rencontrées, en particulier avec les Touaregs un « dialogue de la vie » qui a été présenté ensuite par l’encyclique « Ecclesiam Suam » du Pape Paul VI en 1964 comme la base fondamentale de tout dialogue : « On ne sauve pas le monde du dehors ; il faut comme le Verbe de Dieu qui s’est fait homme, assimiler, en une certaine mesure, les formes de vie de ceux à qui on veut porter le message du Christ….Il faut partager les usages communs, pourvu qu’ils soient humains et honnêtes, spécialement ceux des plus petits, si on veut être écouté et compris. Il faut avant même de parler, écouter la voix et plus encore le cœur de l’homme…Il faut se faire les frères des hommes…Le climat du dialogue c’est l’amitié » N°87.

Ainsi, le Frère Charles, en consacrant toute son énergie et une grande partie de son temps à apprendre la langue des Touaregs dont il partageait la vie, en développant des conversations toutes simples sur les réalités de leur vie quotidienne, en s’ouvrant à leur poésie et ainsi en tentant de comprendre le génie de ce peuple, a su ouvrir, par le dialogue avec ses hôtes, un climat de confiance au point qu’il est devenu pour beaucoup « un ami ». Il a ainsi montré que la mission de l’Église, c’est aussi de susciter des frères, dans le respect des différences de culture ou de religion, comme s’y est employée ensuite l’Église en de nombreux pays de la planète, forte des ouvertures du Concile Vatican II.

On peut donc reconnaître, pour les prêtres de la fraternité sacerdotale Jésus Caritas que nous sommes, que le Frère Charles nous a ouvert une spiritualité du dialogue qui peut encore nous inspirer dans les rencontres que nous vivons non seulement avec les musulmans mais aussi avec tous ceux qui ne partagent pas notre foi. Ainsi le chemin de dialogue qu’il a ouvert avec les Touaregs s’est déployé en plusieurs figures fondamentales :

  • Il a su se dépayser pour aller s’immerger dans le pays de l’autre. Il a réalisé ce mouvement que le Pape François appelle « une Église en sortie ». Il a désiré se faire accueillir par ce peuple et devenir dans la mesure du possible « l’un d’entre eux ». Et il a fait de l’apprentissage de leur langue une œuvre mystique car elle se situait pour lui dans la ligne de l’incarnation du Christ dans cette humanité qu’il est venu sauver.
  • Bien que son plus grand désir ait été que les musulmans se convertissent à la foi chrétienne, il n’a jamais exercé quelque pression que ce soit pour arriver à ses fins. Il a toujours respecté leur liberté. En 1908, il a reconnu qu’il ne ferait aucune conversion et il en a conclu ce n’était sans doute pas la volonté de Dieu. Mais il est resté au milieu de ce peuple touareg au nom de l’alliance qu’il avait contractée avec lui, simplement pour avancer sur le chemin de la fraternité avec lui.
  • Son but : devenir l’ami de l’autre. Dans une lettre qu’il adresse à un correspondant, il caractérise ainsi le mode de relation qu’il veut adopter avec les musulmans qui l’entourent : « D’abord préparer le terrain en silence par la bonté, un contact intime, le bon exemple ; les aimer du fond du cœur, se faire estimer et aimer d’eux ; Par là, faire tomber les préjugés, obtenir confiance, acquérir l’autorité – ceci demande du temps – ensuite parler en particulier aux mieux disposés, très prudemment, petit à petit, diversement, en donnant à chacun selon ce qu’il est capable de recevoir. ». A défaut de pouvoir annoncer explicitement l’Évangile, il a voulu par sa personne devenir lui-même présence d’Évangile. C’est ce qu’il entendait en disant vouloir « crier l’Évangile non par la parole mais par toute sa vie »
  • Il a su s’ajuster au regard que Dieu porte sur les musulmans qu’il a rencontrés. Il n’a pas d’abord vu en eux des « infidèles » ou des « mécréants », mais, dans son désir de devenir un frère universel, il les a considérés comme « des frères bien-aimés, des enfants de Dieu, des âmes rachetées par le sang de Jésus, des âmes bien-aimées de Jésus ».
  • Il a manifesté le visage d’une Église diaconale. Il ne s’est pas contenté de vivre avec eux mais il a aussi contribué, dans la mesure de ses possibilités, à l’amélioration de leurs conditions de vie et au développement de leur pays. Il a lutté contre l’esclavage, combattu les maladies, introduit dans ce pays très pauvre des médicaments, des techniques nouvelles d’agriculture et des moyens de communications.
  • Chaque fois à qu’il a pu, il a ouvert un dialogue spirituel avec les musulmans. Bien sûr il n’adhérait en rien à la doctrine de l’islam. Mais il lui reconnaissait un point commun avec la foi chrétienne : le double commandement d’aimer Dieu de tout son cœur et d’aimer son prochain comme soi-même. Sur cette base il a développé de nombreux dialogues avec ses amis musulmans, leur montrant en diverses circonstances comment ce double commandement pouvait se déployer dans leurs relations quotidiennes.
  • Enfin, et ce n’est pas un des moindres éléments du dialogue, il a fait du mystère pascal la voie royale du dialogue. Car, en contemplant sans cesse la vie du Christ à Nazareth, il a pris comme lui le chemin de l’humilité, de la pauvreté, de l’écoute et de la mort à soi-même dans la rencontre de l’autre. Il a ainsi manifesté par toute sa vie qu’ « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. »

En se présentant comme « un défricheur », il nous a montré que le dialogue de la vie fait partie intégrante de la mission de l’Église.

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Texte 4. Notre mode d’évangélisation

Fernando Tapia, Chile

En tant que prêtres diocésains, nous partageons avec toute l’Église la seule mission qui est la sienne : évangéliser. Le pape François nous a donné des orientations très claires pour ce faire dans son Exhortation apostolique « Evangelii Gaudium ». Nous faisons nôtres ses propres orientations et essayons de nous en inspirer pour notre action d’évangélisation dans nos paroisses, communautés, centres de formation chrétienne, centres de soins pour les plus pauvres, etc.

Cependant, la question est valable si nous, en tant que prêtres de la Fraternité IESUS CARITAS, en développons quelques accents particuliers nés du charisme du Frère Charles et de notre spiritualité. Nous pensons que oui, et voici exposés ici quelques uns de ces accents.

1. LE MYSTÈRE DE L’INCARNATION

Notre façon d’évangéliser est d’abord marquée par le mystère de l’Incarnation, un mystère qui a fasciné frère Charles et qui est à la racine de sa spiritualité:

«L’incarnation est enracinée dans la bonté de Dieu. Mais une chose apparaît, tout d’abord, si merveilleuse, brillante et étonnante qu’elle brille comme un signe éblouissant : c’est l’humilité infinie qui entoure un tel mystère. Dieu, l’Être, l’Infini, la Perfection, le Créateur, l’immense Tout-Puissant, le Seigneur souverain de tous, devenant homme, se joignant à une âme et un corps humain et apparaissant sur terre comme un homme, et le dernier des hommes  » (Ecrits spirituels p.49.)

L’Incarnation se produit toujours en un certain temps, lieu et culture. Frère Charles a conduit un gros travail de connaissance de la culture des Touaregs, de leur langue, de leurs coutumes, de leur poésie, etc. Nous voudrions toujours prendre en compte le contexte historique, les caractéristiques du temps et de la culture dans laquelle nous évangélisons, parce que nous sommes convaincus que Dieu prolonge son incarnation à chaque époque et que le Christ ressuscité continue de nous parler par les signes des temps, pour nous inviter à construire son Royaume de Vie.

Compte tenu du fait que le Christ entre dans le monde par « la porte des pauvres », comme l’a dit Mgr Enrique Alvear, nous aimerions nous aussi entrer par cette porte dans notre œuvre d’évangélisation et, à partir de là, proclamer l’Évangile à tous.

2. LES PÉRIPHÉRIES.

Dans un esprit de disponibilité envers nos évêques, nous voudrions exercer en priorité dans les lieux les plus abandonnés et les plus éloignés de l’Église. Périphéries géographiques ou existentielles, comme le dit le pape François. Ce sont des lieux-frontière : populations marginalisées, territoires éloignés, camps de réfugiés, migrants, toxicomanes, privés de liberté, exclus en général. Cette proximité nous permettra d’entendre et de nous mêler au cri des pauvres qui se fait parfois très ténu mais parfois bruyant. Et en utilisant des moyens pauvres, fondamentalement par notre propre présence amicale et miséricordieuse.1

Frère Charles nous dit:

« Pour moi, cherchez toujours la dernière des dernières places, pour être aussi petits que mon Maître, pour être avec lui, marcher après lui, étape par étape, comme un serviteur fidèle, un disciple fidèle et – car, dans sa bonté infinie, incomparable, il est digne de parler ainsi – comme un frère fidèle et un époux fidèle » (EsEs p.68).

« Ce banquet divin, dont je suis le ministre, doit être présenté non pas aux frères et aux parents ou aux riches voisins, mais aux boiteux, aux aveugles, aux âmes les plus abandonnées et à ceux qui manquent de prêtres. J’ai demandé et obtenu la permission de m’installer dans le Sahara algérien. (EsEs p.80).

Si nous sommes envoyés dans des endroits plus aisés, nous aimerions être des agents de sensibilisation sociale et des faiseurs de pont entre les riches et les réalités des pauvres.

Nous sommes arrivés comme amis et frères des pauvres. Nous découvrons Dieu déjà présent dans leurs cris et leurs aspirations. Nous laissons a notre tour les pauvres nous évangéliser et enrichir notre ministère.

3. TÉMOIGNAGE PERSONNEL

Partout, mais surtout dans les lieux marginalisés, nous voulons donner la priorité à l’évangélisation par un témoignage de vie plutôt qu’avec des discours. Témoignage marqué par la proximité, la simplicité, l’accueil, la gentillesse, l’intérêt pour ce qui arrive à l’autre, le service concret, la joie intérieure. Frère Charles a écrit à un ami:

« Vous voulez savoir ce que je peux faire pour les autochtones. Il n’est pas possible de leur parler directement de Notre Seigneur. Cela les ferait fuir. Il faut leur inspirer confiance, s’en faire des amis, leur rendre de petits services, leur donner de bons conseils, se lier d’amitié avec eux, les exhorter discrètement à suivre la religion naturelle, leur montrer que les chrétiens les aiment. (EsEs p.84).

Déjà dans sa Retraite de novembre 1897, il avait formulé sa façon d’évangéliser par cette phrase, placée dans la bouche de Jésus : « Remplissez votre vocation : celle de proclamer l’Évangile sur les toits, non pas avec vos paroles, mais avec votre vie ».

Cela ne veut pas dire que nous avons mis de côté le ministère de la Parole. Nous savons que c’est une partie essentielle de notre mission, celle d’éveiller et de nourrir la foi : « la foi vient par la prédication et la prédication par la parole du Christ »(Rom 10:17). Le Concile Vatican II le dit clairement dans le décret sur « Le ministère et la vie des prêtres »: « La parole de salut éveille la foi dans le cœur des non-croyants et la renforce dans celui des croyants, et avec la foi commence et se développe la communauté des fidèles »

4. NOTRE CHOIX DE LA FRATERNITÉ

Par notre choix pour la fraternité, nous privilégions le travail d’équipe avec d’autres prêtres, qu’ils soient ou non de notre Fraternité, avec des religieux, des diacres et des laïcs. Nous voulons davantage être frères que tyrans, professeurs ou seigneurs religieux, comme dit le Concile : « Les prêtres habitent avec les autres hommes comme des frères. » 3 Frère Charles a devancé à cet égard le Concile quand il recherche et promeut le travail avec les laïcs:

« A côté des prêtres, les Priscille et Aquila sont nécessaires, pour voir ceux que le prêtre ne voit pas, pour pénétrer là où il ne peut pas pénétrer, pour aller à ceux qui le fuient, pour évangéliser par un contact bienfaiteur, avec une bonté débordante sur tous, une affection toujours prête à se donner, un bon exemple qui attire ceux qui tournent le dos au prêtre et lui sont hostiles par principe. » ( Assekrem, 3 mai 1912).

Pour la même raison, nous voulons donner du temps à la formation des laïcs, à leur accompagnement spirituel et à soutenir la formation de communautés fraternelles, dans le respect du rythme de chaque personne.

Nous croyons en la fraternité comme mode de vie, une fraternité universelle, caractérisé par l’amitié, la réciprocité et le dialogue.

De même, notre choix de la fraternité nous conduit à promouvoir la participation des laïcs dans la conduite pastorale de nos paroisses, en évitant toute forme d’autoritarisme et de cléricalisme de notre part et toute forme de passivité de la part des laïcs. L’existence de conseils pastoraux, de conseils pour les affaires économiques, d’équipes pour animer les différents espaces pastoraux, d’assemblées paroissiales, de planification pastorale réalisée ensemble, etc. devrait être la marque distinctive des paroisses ou d’autres structures pastorales confiées à nos soins.

5. VIE SPIRITUELLE ET EUCHARISTIE

Cette manière d’évangéliser suppose pour chacun de nous une vie spirituelle très profonde qui nous conduit à contempler Jésus dans les Évangiles afin de devenir de plus en plus configuré à Lui, grâce à l’action de l’Esprit Saint en nous. Il nous permettra d’entrer dans la dynamique de « kénose », d’abandon, de dépossession, propre au mystère de l’Incarnation, laissant beaucoup de choses pour Lui et pour la fidélité à l’Evangile : préjugés, biens matériels, prestige, recherche du pouvoir, sécurités, etc. Elle nous donnera la liberté intérieure de trouver de nouveaux chemins et de nouveaux espaces dans la tâche d’évangélisation de l’Église, en recherchant toujours la volonté du Père, avec une infinie confiance.

Notre dynamisme missionnaire, en particulier pour rejoindre et demeurer dans les endroits les plus difficiles, est soutenu par la célébration de l’Eucharistie, par l’Adoration quotidienne et les autres moyens de croissance spirituelle, typiques de notre Fraternité. Ils nous aident à prendre conscience de l’amour infini de Dieu pour nous, de sa fidélité et de sa miséricorde, et nous dynamisent dans notre mission.

L’Eucharistie doit devenir un mode de vie pour nous, caractérisé par le partage du pain, des histoires personnelles et de la parole, même avec des personnes d’autres traditions religieuses.

Une expérience spirituelle similaire doit être promue parmi les laïcs si nous voulons transformer nos paroisses dans l’orientation missionnaire que le pape François souhaite : une Église en chemin qui, sans crainte d’être blessée ou salie par la boue de la route, va à la recherche de ceux qui sont loin et rejetés par la société.4

L’Eucharistie, d’autre part, nous ouvre à la participation à un corps ecclésial toujours plus large. Nous voulons être très conscients que l’évangélisation est une mission partagée avec toute l’Église diocésaine et universelle. En tant que prêtres diocésains, nous voulons être les premiers à nous sentir partie prenante d’un presbyterium, avec son Évêque à sa tête, appuyant la gestation et la mise en œuvre de projets diocésains auxquels nous contribuons par nos charismes et accents pastoraux.

POUR LA RÉFLEXION PERSONNELLE ET LA PRIÈRE.

  1. Ajouteriez-vous un point à ce schéma ?
  2. Ma structure pastorale (paroisse, centre de formation, etc.) évolue-t-elle selon cette orientation ?
  3. Quelles caractéristiques notre style de vie personnel doit-il avoir pour être en cohérence avec cette manière d’évangéliser?

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Le père Antoine CHATELARD, une vie sur les pas de Charles de Foucauld.

Le père Antoine Chatelard, religieux de la congrégation des Petits Frères de Jésus, est décédé à 90 ans. Avec lui s’éteint un grand connaisseur du Sahara algérien et de ses hommes, un amoureux du détail, un biographe passionné et reconnu de la vie de Charles de Foucauld, figure spirituelle majeure de sa congrégation.

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TOUT EST GRÂCE. La dernière lettre d’Antoine CHATELARD

Tout est grâce ! Il nous est donné d’accueillir NOËL et la nouvelle année en même temps que le Covid 19. Édouard et Paul-François ont été testés positifs, Immanuel et moi négatifs, hier lundi soir suite à la visite d’une nièce d’Édouard venue de Paris le 16 et 17 décembre. On s’organise donc face à une situation nouvelle sans bien savoir ce que nous réservent les jours qui viennent.

Merci de vos nouvelles et de vos vœux. Ils m’arrivent presque tous après un silence qui s’explique par les événements de cette année spéciale, qui remettent en cause les habitudes et les relations normales. C’est aussi une nouvelle manière de revivre notre histoire à travers les années qui ont laissé des traces avec les célébrations de personnages historiques qui n’avaient pas marqué mon histoire alors que j’étais loin de France et sans les possibilités d’information dont nous disposons maintenant.

A ceux et celles qui se posent des question sur mes occupations et sur mon nouveau livre je dois dire qu’il ne sortira qu’ à l’annonce de la date de la canonisation pour des raisons commerciales évidentes. Il est chez l’éditeur depuis plus d’une année et ne parlera que de Charles de Foucauld à Tamanrasset en commençant par l’historique de l’Asekrem où il ne séjourna que quelques mois en 1911 et qui reste source de questions sur ses vraies motivations. Suivra un chapitre sur ses occupations de l’année suivante à Tamanrasset (1912) typique de sa conception des affaires du monde. Le chapitre 3 se limitera à ses seuls passages programmés à Marseille en 1913, avec un jeune touareg, dont on a encore jamais parlé, même dans les livres les plus récents. Enfin dans un dernier chapitre, la seule journée du 1/12/1913 à Tamanrasset nous permettra de le voir vivre dans ses différentes occupations en essayant de suivre son emploi du temps revu et corrigé.

Ce ne sera qu’une introduction pour d’autres sujets qui méritent des mises au point et peuvent nous révéler encore une forme de sainteté pas toujours évidente. J’apprends à l’instant que notre pape François ne s’est pas contenté de conclure son encyclique Tutti fratelli en parlant de lui mais qu’il vient d’offrir une biographie de ce futur saint aux membre de la Curie romaine, sans dire de quel livre il s’agit. En terminant « Fratelli tutti » en mentionnant notre frère Charles il m’encourageait à poursuivre mon travail pour montrer avec plus de détails ce qu’a été sa vie fraternelle avec des hommes et des femmes qu’il a aimés, non pas seulement pendant une seule journée mais chaque jour, pendant les dernières années de sa vie. Ce sont des centaines de personnes qui sont venues dans ce qu’il avait appelé « la fraternité » quand il rêvait encore de regrouper des disciples mais où il a toujours été seul.

Dans les premières années il notait seulement les noms des bénéficiaires de ses aumônes et de ses petits cadeaux, sur des feuilles détachées qu’on ne retrouve pas dans l’édition des carnets. Ce n’est pas sans importance car il nous fait connaître ainsi des centaines de personnes rencontrées, dès les premières années. En revanche pendant les trois dernières années il a noté chaque jour leur nom et on peut compter que quelques uns sont venus des centaines de fois. Ces chiffres sont importants pour comprendre l’importance de ces visites reçues auxquelles s’ajoutent celles qu’il va faire aux uns et aux autres.

Lui qui dans les premières années ne sortait pas à plus de cent mètres, n’hésite plus à faire des kilomètres pour aller chez ceux et celles qui sont malades, mais aussi pour visiter leur nouvelle maison ou pour voir leur jardin, alors qu’il est très occupé par son travail linguistique, par ses temps de prières et par une correspondance très abondante. Je voudrais montrer qu’il ne fait plus rien pour les convertir, même s’il en parle encore quelques fois, mais se sent le devoir de travailler à leur salut comme au sien, en les aimant comme ils sont et comme Jésus les aime. C’est ainsi que s’exprime dans les listes quotidiennes de ses carnets et aussi dans ses rares écrits personnels ou dans certaines lettres son souci du salut de chacun.

J’apprends donc à compter ces personnes, surpris de découvrir que beaucoup étaient encore vivants quand je suis arrivé à Tamanrasset et à l’Asekrem en 55 et même bien plus tard.

C’est sûr qu’il a encore quelque chose à dire à notre Église et au monde, même si ce n’est pas nouveau. La reconnaissance officielle et universelle de sa sainteté sera un bon réconfort pour tous ceux qui se réfèrent à lui partout dans le monde et surtout parmi les évêques, les prêtres et les laïcs, religieux et religieuses qui se sont laissés inspirer par lui et qui ont disparu après avoir jouer leur rôle dans le monde. Elle sera surtout un appel pour les jeunes qui ne s’ intéressaient plus à ce témoin d’un autre siècle.

Oui merci à François, notre pape, qui aurait pu terminer en citant encore François d’Assise et qui nous a parlé de Charles comme s’il lui donnait un rôle important pour l’avenir de l’Église et du monde après la pandémie universelle qui retarde sa canonisation. On n’a jamais autant parlé de notre bienheureux que ces derniers temps avec le décès de Mgr Teissier, le jour même de sa fête. L’ambassadeur d’Algérie en France s’est exprimé dans un langage prophétique, faisant de lui un saint et surtout un compatriote. La canonisation n’ajoutera pas grand chose à ces cérémonies de Lyon et de N-D d’Afrique. Beaucoup avaient pu voir la revue « En Dialogue » n°14, sur Charles de Foucauld et les musulmans, sortie juste avant ces événements.

Je dois reconnaître que le vieillissement n’améliore pas mes possibilités de déplacement même à l’intérieur et malgré les séances de kiné à l’extérieur. Les événements m’occupent plus que mon travail sur Foucauld et la perspective trop lointaine de voir sortir mon livre ne m’encourage pas à travailler, même si des questions venues de partout y compris de Tamanrasset et d’ailleurs en Algérie m’obligent à répondre sur des points de détails qui ne m’éloignent pas de son histoire.

A chacun un joyeux noël et une meilleure année 2021
Antoine

PDF: Tout est grâce ANTOINE CHATELARD – FR